Le colloque « Sens dessus dessous : Réformes du service public et (contre-)discours » fait suite aux cinq colloques précédemment organisés par le GReG (Groupe de Recherche sur les Grammaires)1 de l’université Paris Nanterre tout en s’en démarquant. Il entend prolonger la réflexion sur le paramétrage de la (re)construction du sens, conçue comme une activité langagière dynamique dont l’étude requiert l’intégration des différents niveaux d’analyse (morphosyntaxe, phonologie, prosodie, gestualité, sémantique, pragmatique). Sa singularité réside dans le thème choisi, socio-historiquement situé, politique et polémique, qui s’inscrit dans le mouvement d’opposition aux réformes actuelles du service public en général, et de l’enseignement (supérieur) et de la recherche en particulier en France.
L’objectif est de répondre au temps court de la scène politique par le temps (nécessairement) long de la réflexion (collective) à travers l’examen linguistique des textes, discours et contre-discours qui accompagnent les politiques actuelles de transformation du service public menées en France, dans le monde anglophone et au-delà. La question centrale qui nous occupera est celle des ressorts et des effets de ces productions. Les analyses proposées pourront porter sur toutes les langues et couvriront idéalement l’éventail des supports discursifs – genres et médiums – mobilisés :
– allocutions officielles
– entretiens/débats entre acteurs variés (politiques, journalistes, universitaires, citoyens, etc.) – communication numérique : sites web, forums, réseaux sociaux, messages Twitter, etc.
– projets de lois, décrets, ordonnances, circulaires
– rapports d’experts
– tracts
– presse politique
– etc.
Les aspects du thème général que nous souhaiterions voir développés s’articulent autour de quatre notions liées, dont l’interdépendance pourra être mise à l’étude, sans exclure tout autre piste de réflexion.
– Autorité : Quels sont les paramètres linguistiques qui définissent et permettent de différencier un discours d’autorité, un discours autoritaire, un discours autoritariste ? Comment caractériser le genre discursif du rapport d’expert, qui joue un rôle majeur dans le processus législatif ? Comment la valeur de décret se construit-elle linguistiquement ? Quelle représentation sémantique se dégage du terme omniprésent de « pédagogie » dans les discours institutionnels ? Quelle autorité (au sens de authority et/ou authorship en anglais) pour le contre-discours et comment se construit-elle ?
– Intersubjectivité(s) : Quelles sont les formes linguistiques qui construisent la présence ou l’absence de l’autre dans un discours ? Dans quelle mesure la voix de l’autre est-elle prise en compte et intégrée dans une co-construction du discours et des projets visés ? Quelles stratégies de prise en charge, d’accommodation pragmatique, de modalités intersubjectives peut-on observer dans ces différents types de discours ?
– Transparence/Opacité : Quelle place occupent l’orthophémisme, l’euphémisme et le dysphémisme dans les discours et contre-discours à l’étude ? Dans quelle mesure et par quels procédés linguistiques ces discours recourent-ils à la simplification, d’une part, la complexification, d’autre part ? Ces deux stratégies peuvent-elles aller de pair ? La simplification du discours peut-elle aller jusqu’à sa vacuité ? – Performativité : Comment s’articule le rapport entre les textes de loi et les discours argumentatifs institutionnels qui les accompagnent ? Quels actes de langage (convaincre, promettre, rassurer, expliquer, etc.) y sont convoqués et sous quelles formes ? Quelles mises en scène caractérisent ces discours ? Quelles sont les propriétés performatives des contre-discours ?
Pour aborder ces questions, des contributions de différents types pourront être proposées, pourvu qu’elles s’appuient sur des corpus authentiques : analyse qualitative de textes, discours, interactions ; caractérisation de types de discours à l’appui de corpus spécifiquement constitués ; étude des sens et usages de formes linguistiques ciblées (marqueurs temporels, aspectuels et modaux, connecteurs logiques, néologismes lexicaux ou sémantiques, etc.). Les études proposées pourront concerner toutes les dimensions de la langue et leurs interfaces (morphosyntaxe, lexicologie, phonétique/phonologie, prosodie, gestualité, sémantique, pragmatique) et s’inscrire dans divers cadres théoriques et méthodologiques(analyse du discours, analyse conversationnelle, sociolinguistique, linguistique énonciative, linguistique cognitive, linguistique de corpus, pragmatique, linguistique interactionnelle, approche multimodale, etc.). Enfin, si le colloque vise à réunir des linguistes, il accueillera également volontiers des communications présentées en tandem disciplinaire (linguiste et sociologue/historien⸱ne/chercheu⸱r⸱se en sciences politiques/chercheu⸱r⸱se en sciences de l’information et de la communication, etc.).
Suggestions bibliographiques :
Adam, M. & Kotzee, B. (2019) The rhetoric of the UK higher education Teaching Excellence Framework:a corpus-assisted discourse analysis of TEF2 provider statements, Educational Review.
Angermuller, J. (2013) « Discours académique et gouvernementalité entrepreneuriale. Des textes aux chiffres », in J. Angermuller, F. Lebaron & M. Temmar (dir.), Les discours sur l’économie, Paris, PUF, p. 71-84.
Angermuller J. & Scholz, R. (2013) « Au nom de Bologne ? Une analyse comparée des discours politiques sur les réformes universitaires en Allemagne et en France », Mots. Les langages du politique 102: 22-36. URL : http://journals.openedition.org/mots/21245
Askehave, I. (2007) The impact of marketization on higher education genres – The international student prospectus as a case in point. Discourse Studies 9(6): 723–742.
Devriendt, E. et Monte, M. (2015) « L’exposé des motifs : un discours d’autorité. Le cas des lois françaises de 2003, 2010 et 2014 sur les retraites », Mots. Les langages du politique [En ligne], 107 | 2015. URL : http://journals.openedition.org/mots/21873 ; DOI : https://doi.org/10.4000/mots.21873
Franklin Ayers, D. (2005) Neoliberal Ideology in Community College Mission Statements: A Critical Discourse Analysis. The Review of Higher Education 28 (4) : 527-549.
Krieg-Planque, A. (2015) « Construire et déconstruire l’autorité en discours. Le figement discursif et sa subversion », Mots. Les langages du politique [En ligne], 107 | 2015. URL : http://journals.openedition.org/mots/21926 ; DOI : https://doi.org/10.4000/mots.21926
Krieg-Planque, A. (2012) Analyser les discours institutionnels. Paris: Armand Colin.
Mautner, G. (2005) The entrepreneurial university: A discursive profile of a higher education
buzzword. Critical Discourse Studies 2(2): 95–120.
Mayr, A. (ed.) (2008) Discourses of Higher Education: Enterprise and Institutional Change in the
University. In Mayr, A. (ed.), Language and Power: An introduction to Institutional Discourse. London & New York: Continuum.
Monte, M. et Oger, C. (2015) « La construction de l’autorité en contexte. L’effacement du dissensus dans les discours institutionnels », Mots. Les langages du politique [En ligne], 107 | 2015. URL : http://journals.openedition.org/mots/21847 ; DOI : https://doi.org/10.4000/mots.21847
Stavrou, S. « Des discours politiques au discours de l’évaluation. Autour de la réforme des formations universitaires », Mots. Les langages du politique [Online], 102 | 2013. URL : http://journals.openedition.org/mots/21357 ; DOI : https://doi.org/10.4000/mots.21357
Thornborrow, J. (2014 [2002]) Power talk. Langage and Interaction in institutional discourse. New York: Routledge.
Välimaa, J. & Weisterheijden, D.F. (1995) Two discourses: Researchers and policy-making in higher education. Higher Education 29: 385-403.
MODALITÉS DE SOUMISSION DATE LIMITE : 5 février 2021
Nous invitons à la soumission de résumés anonymes d’une page maximum, (soit environ 3000 signes), exemples et références bibliographiques compris, en anglais ou en français ainsi que 4 mots clés, le premier spécifiant le domaine linguistique de l’étude.
Les propositions seront examinées anonymement par deux membres du comité scientifique. Elles sont à envoyer, sans mention du nom de l’auteur / des auteurs, par courriel en fichier attaché (format word .doc ou PDF) aux deux adresses suivantes :
Préciser, pour l’objet du message : « Colloque GReG PLS 6 »
Indiquer dans le corps du message : nom de l’auteur / des auteurs ; titre de la communication ;affiliation ;adresse électronique ; téléphone(s).
CALENDRIER
Soumission des résumés : 5 février 2021
Notification d’acceptation : début avril 2021 Colloque : 1-2 octobre 2021
CONTACTS : sraineri@parisnanterre.fr; hchatell@parisnanterre.fr